Lyrics : Many Yem Photo : Julien Pitinome
Du hip hop à la littérature, cette amoureuse des mots s’attaque également aux maux de la société. Rencontre avec Samira El Ayachi, romancière et autrice pour le spectacle vivant.
Le sourire timide, jouant avec les manches abîmées de son gilet fétiche, Samira semble être restée à l’âge où tout est à découvrir. Elle garde en elle, ce petit truc qui caractérise l’enfance, du moins en apparence. Car cette quadra, aujourd’hui mama, balance entre fraicheur, candeur et ardeur.
Baignée dans un environnement multiculturel dans le bassin minier, elle grandit entourée de différentes sonorités. Petite, elle pioche ici et là, des mots familiers pour mieux communiquer avec son voisinage – polonais, italien ou marocain – venu s’ancrer dans le Nord de la France. Avec ses parents, le français prend de plus en plus de place. L’amazighe étant sa langue maternelle, elle aime se dire que sa mère faisait preuve de rébellion en les incitant fortement, elle et ses sœurs, à parler berbère.
Parce que, rebelle, elle doit l’être un peu aussi. Cette mordue de lecture en a bouffé de la littérature. Passionnée de mots, Samira aime aussi le style plus fougueux et embrasse sur son chemin l’éloquence du rap. Emportée par les textes rythmés de Saïdou et HK, anciennement du groupe lillois M.A.P., elle s’enivre de cette énergie et admire leur capacité à rassembler des gens autour de leurs paroles engagées.
Madame S. a choisi : elle jette son dévolu sur l’écriture et fini par épouser la carrière d’écrivaine.
À la sortie de son premier livre « La vie rêvée de mademoiselle S. » (éditions Sarbacane), elle se rend vite compte que le visage de ceux qui accèdent facilement à la culture, est bien différent de celui qu’elle s’attendait à voir. Alors elle rêve, encore. Ne perd pas le Nord et provoque des rencontres à Lille, entre auteur.e.s et d’autres personnes ordinaires qui ont parfois une approche trop lointaine de la littérature. Elle charbonne à sa façon et noircit des pages de son histoire. Nourrie par ses aventures littéraires, elle accouche récemment d’ un nouveau roman.
Samira a la voix aussi douce que les mots qu’elle utilise pour s’exprimer. Et pourtant, avec son troisième roman, « Les femmes sont occupées » (Editions de l’Aube) elle vient piquer de sa plume, avec un humour subtil et ironique, un point du corps de la société. Avec douceur et poésie, elle parle ici de violence, d’une violence ordinaire et silencieuse…
En dehors de la « monoparentalysie », la narratrice essaie tant bien que mal, maux pour mots, d’assurer son travail d’écriture pour le théâtre, sa thèse, sa vie de femme, de mère et de cheffe de famille. Peu importe le nombre de casquettes qu’elle porte, « la superwoman est devenue une normalité » et c’est sans casque qu’elle affronte la vie. Cependant, il lui reste de l’énergie, elle puise et se nourrit de l’amour qu’elle-même a créé.
Parce que Samira l’écrit justement, « il y a la puissance du cul de la femme ». Et sa puissance est certes dans la capacité de donner naissance de « petit chose » mais aussi d’enfanter de choses et de projets bien plus grands.
A ECOUTER:
Many, contributrice régulière de Fumigène Mag, revient aux sources de sa pratique journalistique, la radio. La rencontre avec le média podcast a été décisive et lui permet de se plonger dans l’intimité des personnes, des sujets qu’elle met en en voix. Malik Benfadel, son acolyte de toujours, est au mixage pour concocter un podcast pétillant de vérité, d’amour et d’humour.
Ici la parole est à celles et ceux qui font bouger les choses tout en tendant la main aux autres, une mise en lumière sur les héro.ïnes du quotidien sur un ton libre et décomplexé.
« Vi(d)e ton sac », c’est deux formats;
- Une quarantaine de minutes d’interview sur ces femmes dont on parle peu et qui pourtant aident à changer le monde, par leur façon de mener leur vie selon leurs idées et leurs actions.
- « Chro-nique myself », quelques minutes de good vibes et d’humour sur ce que NOUS pouvons faire pour contribuer à améliorer ce monde par le biais d’initiatives déjà mises en place.
Mixage audio par Malik Benfadel. Création et montage par Many Yem.