Lyrics : Alexis Denous

Photo : Nnoman

 

À 5 ou à 11, la banlieue reste la grande absente des débats entre candidats à la présidentielle. Un oubli qui en dit long sur la relation qu’entretient la République avec les millions de Français qui y vivent. Pour essayer d’en finir avec ce silence, Fumigène est allé à la rencontre de chaque candidat et de leurs équipes avec une question simple : quelle est votre mesure d’urgence pour les quartiers populaires ?

 

 

François Asselineau

Sortir de l’Union européenne puis investir dans la construction de logements sociaux

« La première action du candidat de l’Union pour la République (UPR) serait de sortir de l’Union européenne, et ainsi récupérer les 9 milliards d’euros que cette dernière nous coûte pour en investir une partie dans la construction de logements sociaux. »

 

Nathalie Arthaud

L’interdiction des licenciements et la répartition du travail entre tous.

« C’est une mesure qui ne concerne pas que les quartiers populaires, mais c’est sans doute la mesure qui leur serait le plus bénéfique, car le chômage gangrène toute la société, et tout particulièrement les quartiers populaires, avec ses conséquences indirectes : la misère, le chacun pour soi, les petits trafics et la délinquance. »

 

Jean-Luc Mélenchon

Liberté, Égalité, Fraternité pour tout le monde

« Le président de la France Insoumise propose une réponse globale, autour de 3 axes, aux difficultés qui minent les banlieues :

  • Éduquer et former tout le monde (recrutement de 60 000 professeurs)
  • En finir avec le chômage généralisé et plus particulièrement lutter contre les discriminations à l’embauche (populariser le CV anonyme)
  • Améliorer les conditions de vie (généraliser la gratuité, garantie universelle des loyers, en finir avec les violences policières : mise en place d’un récépissé de contrôle d’identité, repenser et développer la formation des effectifs de police et de gendarmerie, démanteler les Brigades anticriminalité qui ne permettent pas d’assurer une bonne relation entre la police et la population et restaurer la police de proximité) »

 

Philippe Poutou

Lutter contre les discriminations et renforcer les services publics

L’état de délabrement économique et social des quartiers populaires est indéniable. La nécessité de renforcer et soutenir les services publics, de construire des écoles, de diviser le nombre d’élèves par classe, de réduire le temps de travail, de créer de l’emploi ne sont pas des mesures spécifiques en faveur des quartiers populaires, mais les habitants des quartiers populaires en seront les premiers bénéficiaires. C’est dans les quartiers que ces mesures auront le plus d’impact. Le rapport entre la police et la population doit également être totalement renouvelé. Les forces de l’ordre doivent être désarmées, les Brigades anticriminalité et les Brigades spéciales de terrain doivent être dissoutes, et le récépissé aux contrôles d’identité mis en œuvre, même si cela reste insuffisant pour lutter contre le contrôle au faciès. La lutte contre les discriminations à l’emploi, au logement doit être au cœur des politiques. Le droit de vote pour tous à toutes les élections, ainsi que la régularisation des sans-papiers sont une priorité, tout comme l’abrogation des lois racistes et islamophobes sur le voile, la burqa, ou les emplois réservés qui sont une discrimination de fait.

 

Nicolas Dupont-Aignan

Renouer avec l’Ecole du mérite et de l’effort et refuser tout communautarisme

« Il est fondamental de réhabiliter l’apprentissage et de valoriser les notions de savoirs et d’effort afin d’offrir à chacun la possibilité d’ascension sociale. Nous souhaitons assurer l’égalité républicaine de l’enseignement en maintenant les programmes nationaux, en apportant des moyens supplémentaires aux territoires défavorisés tout en instaurant une « tolérance zéro » face aux incivilités scolaires. Par ailleurs, il faut garantir la cohésion nationale, par exemple en supprimant l’enseignement des langues et cultures d’origine (ELCO) en primaire ou en conditionnant l’ouverture des mosquées à la signature d’une charte de la laïcité. »

 

Benoît Hamon

Mettre fin au fléau du chômage.

« Je veux que la promesse que nous faisons à la jeunesse, ce soit autre chose. Les missions locales et les agents de Pôle Emploi seront plus nombreux et formés spécifiquement pour favoriser l’accès à l’emploi. Je veux également mieux former, relier et accompagner les jeunes entrepreneurs. Le Revenu Universel d’Existence apportera un filet de sécurité à celles et ceux qui veulent se lancer pour créer de l’activité en les protégeant de la précarité.

Mon projet, c’est aussi de faire du mot « République » une réalité dans le quotidien des habitants des quartiers populaires. Pour cela, je ne vois qu’un seul chemin crédible : le renforcement des services publics. Cela passe d’abord par l’éducation, véritable vecteur d’émancipation. Je veux la renforcer dans ces quartiers en recrutant 40 000 enseignants et en limitant à 20 le nombre d’élèves par classe en CP, CE1, CE2 dans les REP, et REP +.

Enfin, il faut impérativement rétablir le lien entre la population de ces quartiers et la police. Je souhaite mettre fin à l’opacité des autorités et proposer une publication de données précises et régulières. C’est pourquoi je veux créer une police de proximité et expérimenter le récépissé de contrôle d’identité. Pour être respectée, notre police doit d’abord être respectable. »

Le candidat PS à la présidence de la république souhaite également instaurer « une brigade de lutte contre les discriminations », qui « vérifiera régulièrement les pratiques des services publics et privés en matière de discriminations », et un service public de l’orientation scolaire face aux discriminations à l’orientation, fondées sur les préjugés et parfois, de l’autocensure ».

 

Jacques Cheminade

Investir dans le logement et les transports

« Intégrer la banlieue dans un plan d’urgence rénovation de 500 000 logements insalubres et la construction de 150 000 logements neufs supplémentaires par an à des prix accessibles tout en lançant une grande politique de désenclavement par un investissement conséquent dans les transports publics. »

 

Jean Lassalle

Malgré nos sollicitations, nous n’avons eu aucune réponse du candidat.

 

Marine Le Pen

Le Front national n’a pas souhaité répondre à nos sollicitations malgré nos relances, diverses et nombreuses.

Toutefois, en reprenant ses différentes déclarations et discours, la présidente du Front national défend une vision sécuritaire et autoritaire de la politique de la ville. Elle prône un « plan de désarmement des banlieues et une reprise en main par l’État des zones de non-droit » par le ciblage des « 5 000 chefs de bandes délinquantes et criminelles identifiées par le ministère de l’Intérieur ».

Marine Le Pen souhaite par ailleurs « supprimer le versement des aides sociales aux parents de mineurs récidivistes en cas de carence éducative manifeste » et « instaurer le port d’un uniforme à l’école ».

La présidente du Front national pointe par ailleurs la nécessité de « rééquilibrer la politique de la ville vers les zones désertifiées et rurales ».

 

Emmanuel Macron

Créer de l’emploi et plus d’accès à la culture

« L’urgence c’est de créer tout de suite des emplois pour les habitants des quartiers populaires. Toute entreprise, partout en France, qui recrutera un habitant des quartiers prioritaires en CDI bénéficiera de 15000 euros sur 3 ans. Pour la plupart, c’est comme si elles ne payaient plus de charges ! Il faut recréer de la mobilité pour que les habitants des quartiers populaires ne soient plus assignés à résidence. Je propose aussi un pass culture de 500 € pour tous les jeunes de 18 ans, une lutte forte contre les discriminations et plus de logements pour les jeunes.»

Pour Emmanuel Macron, il faut chercher des solutions dans la nouvelle économie et les nouvelles technologies qui permettent à des jeunes gens issus de quartiers populaires de créer leur propre emploi, leur propre entreprise, à l’image des VTC (Véhicule de Tourisme avec Chauffeurs). Encore ministre de l’Economie, il avait déclaré : « Un jeune n’a pas envie qu’on l’assiste. Ce qui est insupportable, quand on vient d’un quartier, c’est de considérer qu’on est un public éligible à des mécanismes d’aide. Moi, je leur parle création d’entreprises, plaidait-il lorsqu’il était encore ministre. Pour eux, trouver des clients, c’est plus facile que de trouver un employeur. »

 

François Fillon

Le candidat Les Républicains n’a pas répondu à nos différentes sollicitations.

Néanmoins, une plongée dans son programme et ses différents discours et déclarations permettent de pointer la vision du candidat Les Républicains à l’élection présidentielle.

Les banlieues demeurent des zones de non-droit pour l’ancien Premier ministre. Lors d’un meeting intervenu à la suite du viol présumé de Théo, à Aulnay-sous-Bois, devant une salle acquise, François Fillon a dénoncé les « excités en cagoule qui caillassent les pompiers » et aux « irresponsables qui tirent à balles réelles » sur la police.  « Ce ne sont pas des sauvageons, ce sont des sauvages » a t-il ajouté, en référence aux échauffourées en marge des manifestations en soutien à Théo.

Il est par ailleurs favorable à l’abaissement de la majorité pénale à 16 ans : « J’ai très longtemps hésité sur cette mesure, mais elle est aujourd’hui indispensable compte tenu de la montée de la violence des mineurs. Concrètement, il n’y aura donc plus d’excuse de minorité pour le délinquant de 16 ou 17 ans qui commettra un délit ou un crime. Il sera jugé pour ses actes, comme un adulte ! ».

L’ancien Premier ministre fustige une « fracture territoriale » et propose, afin de favoriser la mixité sociale, de supprimer les aides à la construction de logements sociaux lorsqu’il y en a déjà plus de 30 % dans la commune.

Il dénonce également le communautarisme : « De faiblesses en abandons, de renoncements en compromis, nous avons laissé proliférer des zones de non-droit, expliquait François Fillon à Charleville-Mézières, le 2 février. Désormais, dans bien des lieux, les règles salafistes semblent prendre le pas sur les lois de la République (…) Nous ne pouvons pas abandonner à leur sort les populations qui vivent dans les banlieues. » Dans la brochure des « Femmes avec Fillon », il s’inquiète ainsi de « la dégradation de la condition des femmes dans les banlieues».

François Fillon veut « retirer les allocations familiales aux parents dont les enfants commettent des manquements répétés » et « rendre aux chefs d’établissement la possibilité d’imposer le port de l’uniforme ».

 

 

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