Lyrics Naïma Amiri – Photo DR

C’est le premier à lever le poing. Sur son terrain, Les Ulis. Dans les urnes, avec La Maison Ouverte, puis Emergence. En réunion publique, dorénavant avec le collectif Rézus. En manif, contres les discriminations et les injustices qui touchent les plus précaires. En studio, d’abord avec P.Kaer, aujourd’hui en solo, pour un nouveau projet Jeunes Vétérans 2.0. Vous aurez compris que c’est aussi le dernier à desserrer le poing.

Prononcez « Efficace », terme qui dans son secteur, aux Ulis, voulait dire « Opé ». Une jolie fille, un mec doué au foot étaient « efficaces ». Ce surnom, c’est au rappeur Grosdash qu’il le doit. Au sein du Collectif Los Monzas, où jeunes, ils freestylaient avec comme exemple les légendaires Time Bomb. « On s’entrainait au quartier, et j’aimais l’improvisation, m’inspirer de ma journée à l’école, rigoler. » Les Amonts, où il a grandit avec cet esprit « westside », est donc devenu Los Monzas. À 16 ans, ses raps étaient «sociaux » car il dissocie le rap conscient et vindicatif, du rap commercial. Il regrette le rap festif et conscient de l’époque de Public Enemy, où le message était déjà présent : « NWA (Nigga With an Attitude), ça me parlait beaucoup. Mon grand frère aussi. Puis, il y a eu Mc Solaar, qui a marqué un tournant. » À la maison, c’était l’effervescence musicale : « Mes oncles en mode Marvin Gaye, Sade. Mes parents m’ont apporté la musique du Congo, Prince et Mickael Jackson aussi. En 88-89 le câble est arrivé aux Ulis et MTV Rap aussi. » Il s’est vite senti en adéquation avec ce qui se passait aux USA, attiré par l’image véhiculée: la réussite d’une minorité, mais aussi leur lutte.

Vers 95 -96, il commence avec avec « Venez on danse ». Puis vient l’Amalgame avec Sinik. En 98, avec d’autres frères de la ville, c’est le collectif Ul’Team Atom qui réalise la mixtape Les anges pleurent, la rue chante avec DJ MYST. En 2004, il a fait 500 morceaux et une centaine de concerts. Fik’s considère cette période comme un véritable centre de formation. « Au collège, j’ai eu une carrière chaotique, j’étais bon élève au lycée, où j’étais dans le commerce, puis j’ai fait un DEUG Eco. J’ai monté des trucs, puis je suis devenu programmateur dans une salle de concert. » Ce truc qu’il a monté n’est rien d’autre que la Battle Dégaine ton Style, qui s’est déroulée aux Ulis de 2002 à 2004. Ces trois éditions ont pour certains marqué un tournant dans les clash, avec le mythique « Sinik VS Kizito ». Avec le label indépendant Kartier Général, ils sortent en 2009 Jeunes Vétérans Vol 1. « On a fait Fik’s et P.Kaer car dans Ul’Team Atom, le message n’allait pas assez loin. » Après de gros échanges politiques avec son binôme, il se rapproche aussi du MIB, qu’il a découvert plus jeune. « Il fallait revenir à l’essence, aux valeurs du rap engagé, mais à notre manière pour briser les apriori. Car il n’y a rien de pire que le déni de souffrance. » Il vit la bavure de trop en 2001, une injustice suite à un contrôle aux faciès, et dépose plainte. En vain. D’où le son « Quoi ma gueule », qui a fait du bruit au sein de la Gauche et du milieu punk.

DU RAP SOCIAL AUX ELECTIONS

Il figure sur la liste municipale La Maison Ouverte, qui fait 5% en 2008. Il dit faire des textes durs

mais pas vulgaires. « S’adresser pour s’adapter. On a de la chance de pouvoir transmettre, faisons le bien. L’accompagnement scolaire était important pour moi. » Il milite beaucoup. Redonner du sens à l’éducation populaire, rompre avec les partis traditionnels l’amène à participer à la création d’Emergence : « La première réunion était émouvante car c’était fédérateur et très enthousiasmant. » En 2014, après des trahisons au sein de l’équipe, devenue une caution pour certains, un tremplin pour d‘autres. Son Bilan : « Faut s’battre, mettre son égo de côté et laisser parler les gens à notre place. » Il dit avoir eu une vingtaine pourrie, mais surkiffer la trentaine. Invité pour parler de son parcours à Sciences Po’ auprès d’un sociologue, il remercie les professeurs de lettres qui l’ont valorisé, mais pas les autres. « L’écriture, c’est important, c’est les racines de tout message. » Il participe à la création du collectif REZUS, Réseau d’Énergie des Zones Urbaines Sensibles, un groupe de leaders associatifs réunis afin de répondre au soi-disant silence « complice » que l’on leur prête : «L’esclave a changé de chaînes… Elles sont télévisées. »